Carry me back to old Virginny,
There’s where the cotton and the corn and taters grow,
No place on earth do I love more sincerely,
Than old Virginny, the state where I was born.
                      THE MILLS BROTHERS

Un de mes exercices favoris est de mettre un chronomètre, et d’écrire au fil de la plume pendant 20 minutes. Sans aucun but. C’est ce texte qui en est sorti.

Lors d’une méditation, cette phrase a résonné en moi, libérant un torrent d’émotions. Tristesse. Accueil. Abandon.

C’est fou comme les mots ont un pouvoir.

Nous rentrons à la MAISON.

Chez moi, c’est le mot MAISON qui en premier a atteint le cœur.

Comme E.T. l’extra-terrestre lorsqu’il montre sa planète.

« Maison » a réveillé, ou mis en lumière un sentiment, une sensation, une perception familière.  Celle de ne pas me sentir chez moi. En exil. Pas à ma place. Comme quelqu’un à qui on n’aurait pas donné le droit d’exister, mais qui est là et qui a peur de déranger.

On ? C’est qui ?

Nous rentrons à la maison.

Tristesse, solitude, abandon. Et soudain l’espoir.

Il y a une maison.

Il y a endroit quelque part, ou je peux être chez moi.

Ou nous pouvons être chez nous.

NOUS rentrons à la maison.

Je ne suis pas seul.

Et cette maison est la notre. A tous.

C’est d’ailleurs peut-être là qu’elle se trouve la maison. Dans le NOUS.

Et la lumière se fit en moi. Feu de bois. Feu de joie.

Ainsi donc, j’avais peut-être toujours été chez moi.

Chez moi, là où je suis à chaque moment, à chaque instant.

Dans mon corps, dans mon être, dans chaque pièce ou j’entre, sur le sol ou je marche, dans les endroits nouveaux ou je me rends. Partout. C’est chez moi.

Chez nous.

Nous RENTRONS à la maison.

Et si notre maison est en nous, chaque fois que nous y rentrons.

Alors, ma mission, c’est peut-être celle-là aujourd’hui : aider chacun à trouver sa maison.

Combien d’entre nous se sentent exilés, pas à leur place. Dans leurs corps, dans leur vie, dans leur travail, dans des situations nouvelles, dans leur relation aux autres, ou a eux-mêmes. Étrangers, déplacés, rejetés. Peur de déranger.

Parce qu’un crétin un jour a cru bon, de planter devant sa caverne un panneau sur lequel il a écrit :

Propriété privée. Défense d’entrer.

Et l’exode a commencé.

Pauvre type. Propriété privée. C’est de nous que tu t’es privé.

Il est temps de rentrer chez nous.

De faire de notre vie, notre maison.

Dieu que la vie prend un autre goût lorsqu’on l’envisage comme ça.

Imaginez que vous êtes une lumière puissante. Et sa source se trouve dans votre poitrine.

Jusque là, elle scintillait vaguement, ou par intermittence.

Maintenant, vous pouvez allumer cette lampe, et éclairer le monde autour de vous.

Imaginez que chaque fois que vous entrez dans un endroit, vous y apporter la lumière. Votre lumière. Elle vous éclaire, et éclaire les autres autour de vous.

Vous êtes indispensable.

Votre présence est un cadeau pour les autres. Et cela suffit.

Vous n’avez rien besoin de faire pour exister. Juste être cette lumière.

Amusez -vous à éclairer le monde depuis chez vous. En marchant dans la rue, dans les transports, au travail.

Partout ou vous êtes, c’est la maison. Notre maison.
Et il est temps pour nous de l’éclairer.

Namir ABDEL MESSEEH – ACTIVE CHANGE – WWW.TRANSMITNAM.COM

Hypnose –coaching – Ateliers d’écriture créative – Développement de talents.

Dans cet article, j’aborde un protocole assez…. particulier : le deuil d’un évènement qui n’a pas encore eu lieu. C’est très libérateur.

Depuis la mort de mère, il y a deux ans, mon père vit isolé dans sa souffrance.

Je lui rends visite régulièrement, espérant le sortir de sa prison mentale. Le voir errer dans cet appartement trop grand, rempli de souvenirs et de bibelots, après avoir convaincu ma femme et mes enfants de m’y accompagner, relève plus d’un effort douloureux que d’un réel désir à y aller.

Et je rentre chez moi, triste de le quitter ainsi, triste de voir son état se dégrader, triste n’être même plus capable de passer de bons moments avec lui.

Et mon sentiment d’impuissance grandit, visite après visite.

Le jour de l’anniversaire de ma fille, nous avions prévu une sortie. Mon père n’avait pas la force, ni l’envie de nous rejoindre. Ma femme, me voyant affecté, a alors suggéré que nous passions fêter l’anniversaire chez lui, pensant que ça lui ferait du bien.

Ma femme a renoncé à notre soirée prévue. Nous avons faits quelques courses pour un repas festif, prévenu mon père, et pris la route.

On a trouvé mon père apathique. Il nous a accueilli dans un jogging discutable, n’avait rien préparé pour l’anniversaire. Après avoir joué deux minutes avec les enfants, il est retourné s’assoir sur son fauteuil, à côté de sa radio, puis est parti regarder la télévision dans sa chambre.

On s’est ennuyés. Les enfants ont été pénibles. Et sur le retour, ça a été l’explosion.

Embouteillages. Bloqués  deux heures sur le périphérique, les enfants qui se bagarrent, ma femme qui s’énerve et moi qui hurle. Nous étions tous en colère les uns contre les autres. Ma femme contre moi pour les avoir trainés dans cette soirée pourrie. Moi contre ma femme parce qu’elle rejetait la responsabilité de cette soirée, et de ces embouteillages sur moi. Et nous deux contre les enfants qui faisaient du bruit.

Une fois rentré à la maison, tendu et exténué, j’ai eu envie d’appeler mon père, juste pour  le réveiller et lui dire qu’on venait de passer deux heures dans les transports, que le retour s’était très mal passé, et que j’étais furieux qu’il n’ait fait aucun effort pour nous accueillir, et qu’il n’ait même pas été reconnaissant qu’on soit venus le voir.

Quelques jours, plus tard, un collègue me reçoit pour une séance d’hypnose. Et nous travaillons  sur le deuil. Il me demande alors quel deuil est important pour moi de faire en ce moment.

J’ai perdu ma mère deux ans plus tôt. Mais ce deuil me semble fait. Je  ferme les yeux, et laisse venir à mon esprit la première image qui se présente.

C’est celle de mon père.

Une partie de moi se dit que c’est bizarre de faire le deuil d’un vivant. Mais mon esprit ne vit peut-être pas dans le présent. Parfois, j’ai l’impression qu’il est comme une version de moi, plus lointaine, qui a déjà vécu tout ce que j’ai vécu, et qui me le redonne à vivre.

Une fois mis sous hypnose, j’emprunte donc le chemin du futur.

Je me retrouve dans un endroit calme. Entouré de gens. Il pleut. C’est un cimetière. C’est le jour de l’enterrement de mon père.

Je suis à la fois conscient que je suis dans une séance d’hypnose, et en même temps, présent dans le souvenir, en train de vivre cette situation.

C’est un peu comme un rêve nuageux, chargé d’émotions. La voix du thérapeute me guide. Le rêve se précise, et la sensation de réalité se fait plus forte dans le cimetière.

Je suis maintenant devant la tombe de mon père. Je fais un discours.

Il a trouvé le temps long, Waguih. Mais il est en paix maintenant, aux cotés de sa femme.

Des larmes coulent sur mes joues. Je suis  triste, et pourtant soulagé. Je sais qu’il attendait ce moment depuis longtemps. Mais l’émotion est là, lourde. L’eau coule. Et là,  je perçois mon père, paisiblement allongé aux côtés de ma mère, dans le cercueil. A sa place. Enfin tranquille.

Ses yeux sont fermés. On dirait qu’il dort. Je sens qu’il  me voit pleurer sur sa tombe. Calmement,  il s’adresse à moi.

– Tu sais, je n’attendais rien de toi, Namir.

Sur le coup, je ne comprends pas la phrase. Mais elle traverse mon corps, comme une décharge.

– Je n’attendais rien de toi.

Et soudain, c’est comme une prise de conscience.

Je n’ai jamais demandé à mon père ce qu’il attendait de moi. Je me disais que mon rôle de fils c’était de l’aider à vivre sa fin de vie. Et là, il me disait simplement qu’il n’attendait rien de moi. Sans jugement, ni culpabilisation.
Mon vrai problème, c’est d’avoir voulu imposer à mon père d’aller mieux. Il ne voulait pas aller mieux.  Je le forçais.
Lui résistait.
Et ça me frustrait.

Ce qu’il voulait, il me l’avait déjà dit plein de fois. Et je n’avais pas voulu l’entendre.

Mes lèvres se sont mises à bouger toutes seules. Et je me suis entendu prononcer cette phrase :

– Le meilleur moyen d’aider quelqu’un, c’est de ne pas l’aider.

C’est avec ces mots que je suis revenu au présent.

Mon sentiment d’impuissance avait fondu.

Je venais de faire le deuil de mon désir de guérir mon père.

Il me restait à profiter du temps qu’il lui restait à vivre.

Depuis, je vais voir mon père uniquement quand j’ai envie de partager quelque chose avec lui. Et si lui n’a pas envie de partager, tant pis. Je sais pourquoi je le fais.

J’ai arrêté de lui parler de lui. Et plutôt que de commencer mes discussions par : « bonjour Papa, comment ça va ? », je commence par lui parler de ce que j’ai fait, vécu, ressenti. Ce que je ne faisais pas beaucoup avant. J’ai commencé à lui parler de mes doutes, de mes questionnements, de l’hypnose. Il s’est ouvert. Comme si finalement ça le soulageait qu’on ne lui parle pas de lui. Son attention était ailleurs. Il ne devenait plus un vieil homme qui souffrait, mais un père qui écoutait son fils se livrer à lui.

Et ses résistances se sont envolées. C’est comme si notre relation jusque-là avait eu la forme d’un duel inconscient, une rivalité dans laquelle, chacun voulait se montrer plus fort que l’autre. Et j’avais contribué à alimenter ce rapport.

La relation était plus apaisée. Et c’est comme si, dans cet apaisement, il y avait enfin de la place pour un dialogue.

Alors, je lui ai raconté cette drôle de séance que j’avais faite, et comment je l’avais enterré.

Il m’a écouté silencieusement.

– Tu auras envie que je dise quelque chose de particulier à ton enterrement, Papa ?

– Tu pourras dire : il s’est battu jusque bout, il a affronté jusqu’à la dernière minute.

– Affronté quoi ?

– La vie.

Bien des fois, mon éducation avait été nourrie par ces mots. Se battre, affronter, lutter, résister. Mon père a vécu sa vie comme un combat, dans lequel la réussite c’était comme arracher quelque chose. Mais à qui ?

 – Dieu, merci, j’ai fait ce que j’avais à faire.

– Qu’est ce que t’as fait ?

– J’ai pu construire une situation, vous élever,  ta sœur et toi, et vous permettre d’être autonomes. Dieu merci, aujourd’hui je sais que c’est fait.

-Alors, tu as fait TOUT ce que tu avais a faire ?

– Il ne me reste plus rien à faire.

-Donc tu peux mourir.

-J’aimerais bien.

– Qu’est ce qui t’en empêche du coup ?

-Ah.. ça… c’est encore la vie

-Elle t’embête la vie ?

– Beaucoup

– Elle t’embête jusqu’au bout. Elle ne veut même pas que tu meures. Juste pour te donner une occasion supplémentaire de te battre contre elle.

Mon père a haussé les épaules. On a souri.

Parfois, la meilleure manière d’aider quelqu’un, c’est de ne pas chercher à l’aider.